Ethiopie 10, Du haut de Koremi, coup de chaud en Harari.
Éthiopie 10, Du haut de Koremi, coup de chaud en Harari…
"Pays des origines fécond et nourricier; pays d'autrefois, sans ruine, d'où le temps s'est absenté"
Ainsi parlait Rimbaud de l’Ethiopie.
C’est un nid d’aigle…
Les solides maisons de pierres de Koremi dominent l’Ogaden.
Le regard se perd sur les paysages arides qui s’enfuient vers les « Somali » :
Au plus près, la « Somali » éthiopienne (sans « e »), frontalière de la république de Somalie que l’on imagine à l’horizon ; En commun le peuple « Somali », musulmans de chaque côté de la frontière.
Des frères qui, sporadiquement, se font la guerre pour le contrôle de l’Ogaden.
Une grande région découpée à la hache, sans nuance, par les « conquérants » d’une époque révolue, Italiens et Anglais peu soucieux de l’avenir d’un territoire que rien n’aurait dû partager.
Sur le haut de cette falaise, plombée par le soleil, la maçonnerie sèche des robustes logis de Koremi défie les siècles.
Koremi passe pour être l’un des plus anciens villages d’Ethiopie ;
Habité depuis le XIIème siècle par l’ethnie Argoba, Koremi est toujours debout, vivant et fier.
C’est une jolie ballade dans la campagne proche de Harar.
Aucun service pour s’y rendre, il faut nécessairement trouver une voiture avec chauffeur et un guide pour la bonne forme !
Dans la vieille ville, nous rencontrerons Miki, c’est un jeune guide sympa, qui, sans pression, nous propose ses services pour la visite du village de pierres.
Après plusieurs propositions, nous négocions le prix de la course et en soirée contactons Miki et fixons le rendez-vous pour le lendemain matin.
Peugeot 404 oblige, la voiture nous attend à l’heure convenue.
Miki, le chauffeur et un « cousin » qui apprend le métier de guide nous accompagnent.
Trois accompagnateurs en somme pour le prix attendu !
La suite nous montrera que ce n’était pas de trop !
Piste cahoteuse pour se rendre à Koremi ; le bas de caisse de la Peugeot racle régulièrement la roche en saillie du sentier ; On roule au pas.
Des paysans s’en vont vers les champs de la plaine, kalachnikov à l’épaule.
à l’arrivée au village une nuée de gamins nous entoure:
Tradition oblige, nous achetons des bonbons, c’est le chauffeur qui assurera la distribution.
À l’ombre d’un mur, une assemblée de femmes nous accueille, elles nous tendent des poignées de cacahuètes fraîchement grillées.
Nous sommes invités à partager un breuvage à base de café, on y ajoute une pincée de sel.
Moment en suspension, intervalle pour la rêvasserie sur les hauteurs de Koremi.
Plus tard, nous rencontrerons les hommes :
Dans un intérieur d’une étonnante fraîcheur, assoupis sur d’épais matelas, vieux et plus jeunes semblent désœuvrés, sans curiosité aucune sur notre présence.
Aucune sollicitation de leur part.
Le village est paisible, reposant.
Le retour le sera moins.
Ils ont vu la voiture passer au pas.
Ils savent que la 404 trimballe des farenji.
Dans une courbe accentuée, au milieu de nulle part, ils ont placé un tutuk entravant la piste :
ils sont à deux, jeunes, passablement nerveux.
Tendue dans la main, la lame de couteau ne laisse aucun doute sur leur intention.
Le chauffeur stoppe le véhicule sans couper le moteur.
La négociation débute sans agitation de la part de nos trois accompagnateurs.
Ça va durer…Dix minutes, peut-être plus…
Ces moments-là paraissent toujours trop longs.
Il va falloir raquer !
Miki et le chauffeur prennent les choses en main, à aucun moment nous sommes impliqués bien qu’il s’agisse de notre présence qui motive le racket.
À la vue des billets qui s’enroulent dans la main du chauffeur, celui qui tient le couteau s’apaise.
Il empoche 100 birrs, une somme dérisoire (3 euros), mais dans une Éthiopie rurale, elle prend toute son importance.
Gros coup de chaud sur les hauteurs De Harar !
Au retour en ville, le guide établira un constat auprès du bureau du tourisme.
Miki connait parfaitement le village et ses habitants, c’était la première fois qu’il rencontrait ces deux racketteurs.
Ce n’est pas un bon signe nous a-t-il dit.
Nous l’avons évidemment dédommagé, tant son attitude fût à la hauteur du traquenard dans lequel on s’en tire très bien !
(désolé je n’ai pas fait de photos !)
Bières fraîches et « fanta »dans le « jogol » pour calmer les émotions.
Le lendemain, nous repartirons pour Addis, nous n’avons pas le choix, aucun service ne permet de relier le « Far-Est » au nord du pays, là où nous poursuivons notre route.
Option du minibus, mauvais choix.
Sur les étroits lacets des montagnes du Harari, un chauffeur surexcité, main en permanence sur le levier de vitesses, se prend pour Shumacher (du temps de sa splendeur !).
Le Toyota est trop chargé, nous sommes vingt et un à bord. On mesure notre erreur.
À la faveur d’une courbe serrée mal négociée, le véhicule se déporte dangereusement.
Là je pète un câble, j'engueule fermement le "pilote " (j’ai l’âge d’être son père).
Avec l’assentiment de quelques compagnons de voyage éthiopiens, on lui dit de faire pédale douce !
Il va se calmer.
Nous allons nous arrêter prendre le café.
Dans le village, il achètera des brassées de Khat qu’il sait savoir vendre deux à trois fois plus cher à Addis, et va commencer à en brouter régulièrement.
Ça a l’air de marcher, il adopte une conduite cool et me demande régulièrement si je vais bien avec sa nouvelle façon de piloter !
« are you ok father ? how is my driving ? »
Bref, je sens que je vais me faire un pote !
Le retour est pénible :
Nous sommes sur l’axe Djibouti/Addis, une route extrêmement contrôlée, cible de la contrebande en tout genre.
Pas moins d’une quarantaine de « check point » sur onze heures de trajet.
Parfois les sacs sont fouillés (pas les nôtres), parfois avec quelques billets discrètement glissés dans la main du policier tout s’arrange.
Peu avant l’arrivée à Addis, le pneu arrière gauche rend l’âme.
Changement rapide de roue au milieu d’un désert épineux : en bord de route, une grande misère:
Des huttes bâchées de plastiques et de sacs usagés.
Terrible chaleur !
Addis se profile…C'est comme si nous rentrons à la maison !
Enfin presque!
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