Pérou 2, Le Seigneur de Sipan et les hautes terres de Cajamarca.
Pérou 2,
Le Seigneur de Sipan et les hautes terres de Cajamarca.
Les pilleurs de tombes ont fait sortir de l’ombre la province de Lambayeque.
Avec Chiclayo, cette ville trop remuante, trop étouffante, où il n’y a pas grand-chose à voir, mais qui est en passe de devenir une des plus grandes conurbations urbaines du Pérou, la région tire légitimement profit de la découverte de la sépulture d’El Siñor de Sipan.
En 1987, la police locale fait main basse sur des objets d’art volés en partance pour des collectionneurs privés.
Le butin est splendide, le patron du musée de Lambayeque entame immédiatement des fouilles laborieuses sur le site d’où provient le barbotage de parures en or, colliers, bracelets, céramiques…
Deux « pyramides », rabotées par le temps, jusqu’alors oubliées, sauf des pilleurs qui avaient une longueur d’avance sur les archéologues, vont libérer des véritables trésors de la culture Mochica, civilisation Précolombienne qui vit le jour huit siècles avant l’empire des Incas (100 après J.C.)
La tombe du Seigneur de Sipan, puissant Roi local, sera mise à jour : événement considérable dans le milieu de la fouille archéologique, et sursaut inespéré de la région nord du Pérou qui saura médiatiser cette trouvaille en développant tout un complexe de visites dans la région :
Piràmides de Tùcume, Huaca Rajada…
Les « connaisseurs » considèrent cette découverte récente à la hauteur du phénomène Egyptien Toutankhamon.
Ouvert au public en 2002, le superbe musée de Tumbas Reales de Sipan, est le point d’orgue de la province.
Probablement le meilleur dans son genre, non pas du Pérou mais d’Amérique Latine, ce musée offre sur trois niveaux une impressionnante collection dédiée à la civilisation Mochica.
Visite au pas de course avec les guides, dommage, c’est pourtant assez rare qu’on se presse au Pérou ! Photos interdites dans les salles principales.
Qu’on se le dise, il n’y a pas que les Incas au Pérou !...il y a aussi les Mochicas !
Nous quitterons Chiclayo et le Pacifique pour les hautes terres du nord. Le bus nous trimballe confortablement vers la belle et authentique citée coloniale de Cajamarca.
Ascension continuelle et régulière s’élevant dans une mer de nuages au-dessus de profondes vallées fertiles, terre de paysans, grenier des Andes du nord.
Malgré la beauté sauvage du paysage, nous somnolons à l’avant du bus de la compagnie Linea.
En plein raidillon d’un col à faire pâlir les grimpeurs du Tour, une explosion nous tire de notre léthargie un moment…Le bus poursuit sa grimpette sans que les passagers s’en alarment.
Quelques chuchotements sans plus.
Une dizaine de minutes plus tard, surplombant des rizières, une esplanade au bord d’une tienda de montagne permettra l’arrêt du long véhicule : tout le monde descend, c’est l’occasion de se dégourdir les jambes en grignotant un épi de maïs chaud…
Pendant ce temps, les chauffeurs s’affairent à placer le cric sous l’essieu et à déboulonner la roue traitresse !
Un pneu a littéralement explosé dans la montée !
Mon voisin Péruvien, tout sourire, me dit que comme ça on est peinard, celui-là au moins ne pétera pas dans la descente du col !
Ça sent le vécu, moins rapide qu’en formule 1, mais à peine dix minutes plus tard la roue de secours qui doit voisiner les 100kg est en place !
Nous arriverons en fin de journée dans la ville « nouvelle » de Cajamarca.
Un taxi nous conduira à la Plaza de Armas, centre historique égrenant belles façades et édifices coloniaux qui virent le sang du « rebelle » Inca Atahualpa se répandre un jour de la Sainte année 1533, signant ainsi la fin de l’empire Inca…
Des récentes recherches laisseraient supposer que la dépouille du dernier empereur Inca, serait en Equateur dans la région de Sigchos (Province de Cotopaxi, point de départ de la boucle de Quilitoa).
À Cajamarca ça sent la vache, le beurre (demi-sel !) et le fromage. La région, délaissée des grands flux touristiques, se consacre à l’élevage et à la transformation du lait.
Entourée par des montagnes arrondies, Cajamarca profite de la richesse de ses pâturages et de son histoire…C’est ici que les Espagnols s’installèrent dès le début de leur conquête.
Ville calme, plaisante, accueil chaleureux dans un hôtel sympathique.
Deux sites remarquables méritent le détour :
L’aqueduc de Cumbe Mayo, un ouvrage d’art hydraulique précolombien qui sur 9 km inverse la ligne de partage des eaux.
Daté d’environ 2000 ans avant JC, cette ingénieuse construction qui fonctionne toujours, prouve que bien avant les Incas, des peuples Indiens développaient habilement des techniques d’une grande complexité.
Taillé dans la roche, le « canal » détourne les eaux pour alimenter un réservoir d’irrigation destiné aux parcelles fertiles de Cajamarca.
Le site montagneux invite à la promenade dans un décor majestueux de hauts plateaux où demeurent quelques fermes… Dépaysement assuré !
Prétexte à une autre visite à proximité de Cajamarca, la nécropole rupestre d’Otuzco présente une longue paroi rocheuse, creusée de niches funéraires réservées aux puissants du moment.
Dominant la vallée, même morts, les dépouilles des notables continuaient de dominer le peuple en contrebas !
Le site est malheureusement peu mis en valeur, les alentours sont assez déglingués…c’est pas le Pérou !
A Cajarmaca, dans le milieu paysan, on ne fait pas que boire du petit lait…Une paysanne « sans envergure », tient tête à une puissante multinationale qui exploite la plus grande mine d’or à ciel ouvert de l’Amérique du sud.
Elle se nomme Maxima Acuna.
Cette bonne femme de l’Altiplano s’obstine à ne pas vendre son lopin de terre aux américains « Newmont » !
Maxima est devenue la figure de proue de la résistance à l’exploitation minière au Pérou.
« Newmont » et son armée d’avocats prétendent avoir acheté ses terres plusieurs années auparavant.
"Je peux démontrer que nous sommes propriétaires de ce terrain depuis 1994, tous mes papiers sont en règle", affirme Maxima Acuna aux journalistes. (Source AFP)
Ce combat, inégal, est une bataille sur fond de qualité et de disponibilité des ressources en eau pour la région.
Coiffé du traditionnel chapeau de paille à large bord de Cajamarca, Maxima défend ses 25 hectares perchés à près de 4000 mètres d’altitude et qui abritent plusieurs sources.
Maxima Acuna doit faire face à d‘énormes pressions, dont des violences policières…
Son combat est médiatisé, c’est une chance, mais la lutte s’avère difficile dans un pays où la corruption est une institution.
Des ONG ont pris le relais de la contestation.
Le Pérou est en pleine campagne électorale (j’y reviendrai), l’eau est un enjeu majeure dans la région de Cajamarca, mais la population ne compte pas sur les « politiques » pour améliorer des situations inégalitaires criantes.
Dans l’ombre des nombreuses églises de la ville, les nouveaux conquistadors, venus cette fois du nord du continent, déploient toujours autant d’énergie à piller impunément les pays « pauvres ».
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