Louisiane 3, le vert des bayous, le rouge du "Tabasco"...
Louisiane 3,
Le vert des bayous, le rouge du « Tabasco »…et les Noirs des plantations.
Elles étaient nombreuses ces immenses plantations le long du Mississippi : de La Nouvelle Orléans à Bâton Rouge, pas moins de 350 riches demeures imposaient leur puissance le long du fleuve.
Le Mississippi permettait les irrigations des champs de cannes à sucre et de coton, facilitait le cabotage des marchandises et…le transport des familles d’esclaves.
Nourries de la sueur et du sang des Noirs corvéables, la fortune fut au rendez-vous pour un grand nombre de planteurs qui édifièrent de somptueuses demeures au cœur même de leur vaste domaine.
La guerre civile arriva avec son cortège de malheurs…L’émancipation des esclaves, balbutiante au départ, se renforça peu à peu sur les terres marécageuses du sud. Bientôt de nouveaux textiles apparurent sur le marché, la demande en coton chuta, le déclin des exploitations était cette fois engagé.
Un peu moins d’une dizaine de plantations survivent fièrement sur les deux rives du fleuve, dont la célèbre « Oak Alley » et ses 28 magnifiques chênes qui enlacent une avenue de 400m menant au Mississippi.
Sous l’impressionnante frondaison plane encore sans doute, l’ombre de Scarlett O’Hara et d’« Autant en emporte le vent ».
Peut être plus authentique, certainement plus « créole » est « Laura plantation » : Guillaume Duparc quittant sa Normandie pour épouser la cause de la révolution américaine aux cotés de Washington et de Lafayette s’installa après la guerre en Louisiane.
Il construisit en 1805 ce qui plus tard s’appellera « Laura plantation » tant l’histoire de ce domaine fût marquée par l’empreinte des femmes, et plus particulièrement par le caractère bien trempé de Laura, descendante des Duparc.
À « Laura plantation » on y parle Français et Créole ; Les propriétaires aiment à se délasser dans les chaises à bascule de la galerie : faite de bois de cyprès, la véranda ouverte, laisse la brise venue du fleuve s’engouffrer dans la villa à colonnade. La construction fut rapidement menée par des esclaves Sénégalais qui ont prit soin de bâtir sur pilotis, prévoyant les débordements réguliers du plus long fleuve des USA.
« Laura plantation » a conservé quelques authentiques cabanes à esclaves parfaitement ordonnées comme le furent plus tard les corons du Nord de la France…Une cloche de bronze rythmait la dure journée de travail des coupeurs de canne à sucre et des piqueurs de coton.
Le vert des bayous…
C’est n’est pas vraiment une surprise, on s’y attendait un peu : les « anciens » qui gèrent « Munson’s swamp tours » à Houma sont cajuns* et parlent un truculent vieux Français.
Passionnante cette partie de l’Amérique où les racines françaises demeurent.
Ces grands pères magnifiques nous ont contés leur enfance dans les bayous et leur surprenante découverte d’une institutrice qui parle une langue totalement inconnue pour eux : jusqu’à l’âge de six ans, ces gamins des marais ne connaissent que le français, l’apprentissage de l’anglais se fera à coup de brimades…
Leur terrain de jeux, ce sont les forêts de chênes et de cyprès dont les troncs baignent dans une eau saumâtre. Dans l’estuaire du Mississippi, les « Cadiens » chassés par les Anglais du Canada (le grand dérangement), apprendront à survivre en cultivant la pomme de terre et en chassant l’alligator…Ces enfants des bayous sont bien loin de l’opulent univers des familles blanches des plantations.
Le bayou a été épargné par l’ouragan « Katrina » ; Les rivières stagnantes qui s’infiltrent dans les marécages abritent une faune abondante : alligators, échassiers, vautours, ratons laveurs…Sous les cyprès chauves, une nature aquatique semble sommeiller au fil des saisons…Le delta est ici un véritable labyrinthe lacustre, c’est le vert qui domine.
Le rouge du « Tabasco »…
Elles sont mondialement connues ces petits bouteilles au capuchon rouge…Souvent copiée, jamais égalée parait-il, la sauce épicée de Louisiane est incontournable dans les saveurs du Sud.
Sur Avery Island, au sud de Lafayette, il reste encore quelques parcelles réservées à la culture du petit piment rouge que l’on cueille à la main, mais production oblige, le gros du tonnage des piments provient d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud.
Les ouvriers de l’entreprise familiale utilisent toujours le petit « bâton rouge » qui leur sert à sélectionner avec assurance la parfaite maturité du piment. Passage au sel, longue maturation en fûts de chêne, filtrage et assemblage au vinaigre font du « Tabasco » la sauce de référence de la cuisine « Tex-mex ».
La « factory » dresse ses hauts murs de briques rouges dans un parc planté de chênes centenaires qui bordent des lagunes où nichent les aigrettes blanches. Aux branches des arbres, flottent dans la brise, comme des perruques suspendues, la « mousse espagnole » caractéristique des forêts de Louisiane.
Sur la route qui mène au Nord, jouant à cache- cache avec le Mississippi, nous ferons l’arrêt « chez Jacqueline » à Breaux bridge.
La localité est réputée pour cuisiner les écrevisses…
Jacqueline a bourlingué derrière ses fourneaux…Trop peut être pour pouvoir servir une véritable cuisine Cajun qu’elle dit pourtant délicieuse…Malgré toutes ses références, l’adresse ne mérite pas qu’on s’y attarde, sauf peut être pour la rencontre du personnage et de sa gouaille…
Plus tard, nous aurons l’occasion de nettoyer des assiettes de jambalaya sans perdre un seul grain de riz !
Le Mississippi d’un côté, les champs de cannes de l’autre, nous progressons vers le Nord, vers le coton et la route du Blues…
* « Cajun » : vu de France nous avons par habitude d’utiliser le terme « cajun » pour définir cette culture pittoresque venue de chez nous (langue, cuisine, danses et traditions)…Mais les descendants des immigrants Français se nomment eux même « Cadiens » en référence à l’Acadie, actuelle province du nord ouest du Canada.
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