Nicaragua 4, Granada la "Grande Impératrice"
Nicaragua 4,
Granada la « Grande Impératrice ».
Elle a la couleur de Trinidad... Un semblant de nostalgie au parfum « latino » costume la ville.
Comme à Trinidad les sabots des chevaux sonnent sur la chaussée du centre historique.
Une odeur de cuir et de crottin frais se répand dans les rues.
Pareil au joyau Cubain, les toits de tuiles des anciennes maisons superbement restaurées s’embrasent au couchant.
On les remarque, assis adossés aux colonnes de bois des arcades ou allongés sous les portes cochères, avec la même indolence qu’à Cuba.
ils pourraient être Cubains, mais ces hommes sont d’ici, ils sont nés au pied du volcan Mombacho.
Comme à Trinidad, ce sont les femmes qui balaient sous les pergolas, passent les serpillères sur les carrelages d’époque et astiquent le mobilier de bois sombre.
Derrière des grilles de fer forgé semblables à celles que l’on voit dans la ville Cubaine, de somptueux intérieurs se dévoilent, impeccablement tenus.
Le goût de Trinidad, l’ambiance endormie des après-midi caliente, tous les ingrédients de la ville coloniale colorent celle que Les Nicas surnomment la « Grande Sultana » :
Granada !
Point d’orgue d’un séjour au Nicaragua, Granada est à l’affiche de tous les catalogues d’Amérique Centrale.
La ville le mérite !
La cité coloniale est à la dimension du marcheur, les centres d’intérêts peuvent être parcourus à pied ou en calèche, tranquillement.
On la dit romantique. Granada est aussi commerçante.
Hôtels fin de siècle, bars et restaurants élégants se disputent les portefeuilles des touristes.
Granada connait son charme, elle sait le vendre ; Amarrée aux rives du lac Nicaragua grand comme la Corse, la douceur des vagues ajoute le soupçon de magie qui la rend chic.
L’envers du décor :
La ville réputée conservatrice affiche une opulence certaine.
Ses nombreuses églises illustrent la puissance cléricale et le poids incontournable de la religion dans le pays.
Daniel Ortega, ancien « révolutionnaire » Sandiniste, avec l’appui de l’Eglise catholique, a capté 60% des voix aux dernières élections.
On dit ici qu’il a troqué le treillis pour enfiler la soutane !
N’hésitant pas à citer les évangiles et le Christ, assuré de la complicité des dignitaires ecclésiastiques, Ortega s’est mis dans la poche l’électorat des pauvres qui galèrent au quotidien.
Cette conversion à l’eau bénite, aussi soudaine qu’opportuniste, a permis à l’Eglise d’imposer ses choix :
Le parlement a adopté un texte interdisant l’avortement thérapeutique, qui pourtant fut gagné par le combat féministe à l’époque Sandiniste.
Le Nicaragua fait partie du cercle restreint des pays où une femme peut mourir d’une grossesse sans qu’un médecin n’ait le droit de tenter de la sauver.
Au hasard de nos ballades, à quelques pas de l’église Merced, nous avons rencontré Bryan armé d’une pelle et d’un balai.
Il nettoie les rues du centre-ville.
Consciencieusement il récolte les détritus dans une petite charrette à bras.
Bryan, un peu timide, cause peu et ne sourit guère…
il nous dit être « payé » par la ville.
Il ne sollicite rien de notre part et nous hésitons à lui donner la pièce qui pourrait le soulager un instant.
Nous l’observons s’éloigner en poussant sa carriole, indifférent au flot des touristes.
Au parc central, en soirée, la bonne fortune nous fait à nouveau croiser le chemin de Bryan.
Il se tient à proximité des barbecues de rue qui parfument l’air chaud de la place.
Nous saisissons cette occasion rêvée pour lui demander s’il souhaite manger une bricole.
« un vigoron(*) por favor» répond-t-il !
Nous lui tendons le billet de cinquante Cordobas qu’il donnera lui-même à la vendeuse lui gratifiant en prime un large sourire empreint d’affection.
Bryan nous dit avoir dix ans.
Des associations (ONG) militent activement pour venir en aide aux enfants des rues à Granada. La charge est très lourde.
(*) Le vigoron : feuille de banane garnie de chou, de porc frit, de yucca, de tomate et piment, le tout assaisonné de jus de citron.
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