Rwanda 4, Benoit ou une histoire Rwandaise, portrait
Benoit ou une histoire Rwandaise, portrait.
Aux éditions « Presses de la Renaissance » 2006,
de l’auteur Révérien Rurangwa, dans son livre témoignage : « Génocidé ».
Extrait :
"Ils m'ont tué, moi et toute ma famille, sur une colline du Rwanda en avril 1994. J'avais 15 ans. Je ne suis pas mort."
"Depuis que, le 20 avril 1994, vers 16 heures, je fus découpé à la machette avec 43 personnes de ma famille sur la colline de Mugina, au cœur du Rwanda, je n'ai plus connu la paix.
J'avais 15 ans, j'étais heureux.
Le ciel était gris mais mon cœur était bleu. Mon existence a soudainement basculé dans une horreur inexprimable dont je ne comprendrai probablement jamais les raisons ici-bas.
Mon corps, mon visage et le plus vif de ma mémoire en portent les stigmates, jusqu'à la fin de ma vie. Pour toujours."
Portrait :
Benoit ou une histoire Rwandaise…
Lui aussi est un « mixte ».
Benoit nous reçoit, tout sourire, derrière son écran moderne d’ordinateur. C’est le représentant du Centre Culturel de Gisenyi.
Le bâtiment abrite également le bureau qui représente l'office de tourisme pour la province de l’ouest.
Les touristes ne se bousculent pas en cette fin septembre, Benoit a du temps et le prend pour nous vendre le « Congo Nile Trail».
De l’entrée à double battants laissée grande ouverte, nous apercevons le flot incessant d’hommes et de femmes marchant vers le « border post ».
Chargés de fruits et de légumes, ils s’en vont commercer à Goma, au Congo, la frontière est à huit cents mètres.
Sur place ils vendront, moyennant un droit de passage, vaisselle Chinoise, ananas, régimes de bananes, patates douces et lourds avocats.
Goma croule sous la demande, les camps de toiles blanches des réfugiés sont légions dans cette ville déchirée par les conflits.
Benoit connait bien Goma…
En 94, les voisins leur ont « facilité » la fuite vers le Congo après l’exécution du père et d’un grand frère.
En échange de la vie sauve, la mère de Benoit a « donné » sa maison et la famille a pu « librement » rejoindre les camps du Congo.
Quand le FPR a reconquis le pays, les tendances se sont inversées.
Les voisins ont eu peur des représailles, à leur tour ils ont décampé, le chassé-croisé s’est effectué, les Tutsi exilés au Congo sont revenus au pays.
La famille de Benoit a retrouvé sa maison…et a « occupé » celle des voisins, vide.
Quelques années plus tard, le gouvernement Rwandais, au nom de la réconciliation Nationale, a donné des garanties aux expatriés, leur assurant un retour sécurisé sur le sol natal, mais bien souvent dans des conditions précaires.
Connaissant la dureté des camps de réfugiés pour l’avoir vécu, la maman de Benoit n’a pas laissé ses voisins une seule nuit dans le camp de transit.
C’est cette veuve, pleurant un mari et fils perdus, qui a été au camp, chercher ses voisins, en leur annonçant qu’elle avait pris soins de leur maison !
Et Benoit de conclure : « ...le soir on a tué une chèvre…on a mangé ensemble... »
Le Rwanda est constellé d’histoires comme celle-ci.
Imbibés de préceptes bibliques dès le plus jeune âge, les Rwandais cultivent le pardon autant que la violence surnaturelle!
Benoit est un personnage connu et important au Rwanda :
à côté de son métier de fonctionnaire, il dirige le meilleur club de cyclisme du pays.
Il a embauché un coach Américain, et c’est légitimement fier qu’il nous dit que l’équipe Sud-Africaine MTN (opérateur téléphonique) lui a débauché un de ces coureurs formé au club.
Avec un peu de chance, le Tour de France pourrait voir son premier compétiteur Rwandais d’ici peu !